mercredi 2 mars 2011

Une affiche qui a du chien


La publicité guette les modes.

L’une des dernières tendances à laquelle elle fait référence a une caractéristique, sinon un nom : l’animalisation de l’homme. Les exemples ne manquent pas en ce moment, notamment grâce à la campagne d’affichage intensive de Grand Optical.

Oui, ce chien porte des lunettes.
Le problème est que je n’arrive pas à comprendre pourquoi une enseigne de lunettes souhaiterait représenter ses clients, actuels ou potentiels, sous les traits du meilleur ami de l’homme. Peut-être ces clients sont-ils tellement satisfaits des services proposés qu’ils demeurent attachés à cette marque, faisant preuve d’une fidélité à toute épreuve ? Si la finalité du message reste ici une énigme, il est en revanche intéressant de la rapprocher des thèses développées par Pierre Schulz, médecin spécialisé en pharmacologie et en psychiatrie, et auteur de Consolation par le chien (édité aux PUF en 2010).

L’ouvrage met en avant la « caninisation » de la société, phénomène « d’envahissement du monde humain par des éléments canins » qui a permis de faire du chien un élément fondamental dans l’équilibre psychique de l’homme : alors que, par le passé, les bénéfices que retiraient l’homme de cet animal étaient matériels (le chien gardait le troupeau ou montait la garde), les apports présents sont avant tout abstraits et ont trait à l’affect. La présence d’un chien rassure, tranquillise et simplifie le rapport à la vie, entre autres avantages.
Cette évolution dans les rapports entre l’homme et son animal de compagnie trouve un écho en sens inverse : l’humanisation du chien ; on prête à ces compagnons l’envie de profiter de la société de consommation au même titre que leur maître, et d’avoir ainsi accès aux marques d’eau minérale et de bières pour chiens qui se sont développées ces dernières années (pour les lunettes, Grand Optical a réglé la question).

Compte tenu de ces nouvelles formes d’échange entre homme et chien, Pierre Schulz n’hésite pas à proposer l’idée d’une société « anthropocanine », potentiellement dangereuse dans les cas extrêmes où la relation entre un maître et son chien primerait sur les rapports que l’homme entretiendrait avec ses congénères. Au théâtre Hébertot se joue d’ailleurs une pièce sur ce thème, « Toutou ».


L’homme ne manquant pas de compagnons à poil ou à fourrure, on pourrait tout à fait étendre ces thèses aux chats, lapins et autres poissons rouges qui peuplent nos appartements et nos maisons (bien qu’il soit difficile de faire boire de la bière à un poisson).
Il faut donc s’attendre à voir d’autres publicités présentant l’homme sous la forme des animaux les plus divers, de manière plus ou moins habile. Dans le cas ci-dessous, je ne suis à nouveau pas sûr de la pertinence du propos :



Le mouton comme symbole de l’audace et de l’affirmation de son identité quand vient le temps de choisir une formation, il fallait oser. On attend avec impatience les prochaines campagnes d’affichage.

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