Les panneaux qui décorent les couloirs et les quais du métro ne sont pas réservés aux seules affiches publicitaires. Comme le constate quotidiennement l’usager, ils représentent également des espaces de libre expression que tout individu peut s’approprier quand il ressent l’envie de communiquer avec les milliers de voyageurs qui transitent dans ce monde souterrain. Que les messages ainsi griffonnés soient concis ou conséquents, il s’en dégage une impression étrange, entre excitation de la transgression, tension du besoin de s’exprimer et urgence de l’acte.
Les plus sommaires sont les signatures. Les « Diam’s » des années 1990 et « Krevet » des années 2000 sont aujourd’hui remplacés par une cohorte d’alias éphémères dont le sens échappe au voyageur. On pourrait imaginer que ces signatures sont celles des concepteurs des affiches, lesquels se lanceraient dans une séance de dédicaces dans les couloirs du métro au risque de provoquer un embouteillage monstre et la colère des usagers. Une explication plus simple, et plus naïve, serait de voir dans ces actes le souhait contradictoire d’exister tout en restant anonyme grâce à des traces énigmatiques.
Certaines interventions sont un poil plus denses, mais laissent le lecteur perplexe.
Pas de signature ici, juste trois mots en forme de slogan. Si ce dernier n’est pas totalement infondé – pourquoi pas un peu de musique dans le métro en effet ; en même temps, si c’est pour écouter RFM ou Chérie FM je préfère ne pas poser la question – le choix du support interpelle. Quel est le rapport entre cheval et musique ? Même d’un point de vue symbolique, on ne voit pas trop le rapport. Et pourtant, l’auteur semble tenir à sa proposition et considérer qu’il est urgent de modifier l’ambiance dans le métro parisien comme le montre son deuxième texte (je demande ici l’aide des lecteurs de ce billet : avez-vous une idée expliquant la présence de ce cheval ?).
Mais les messages peuvent aussi être plus explicites.
Ici, l’affiche importe peu : l’essentiel se trouve dans le propos. Les mots sortent précipitamment et expriment un ras-le-bol, que ce soit sous forme de poésie, d’apostrophe, ou de caricature comme dans le cas du dessin ci-dessous. Dans les deux cas, on imagine un geste non prémédité, qui a vu l’individu le réaliser à sa propre surprise, avec un sentiment de nécessité. Pour preuve : l’absence de commentaires ou de dessins similaires sur les quais des stations environnantes.
Il y a quelques années, alors qu’un fort mouvement anti-publicité faisait rage dans le métro, la RATP avait laissé pendant quelques semaines des panneaux blancs dans certaines de ses stations pour laisser les usagers désireux de se manifester le faire librement. L’expérience n’avait pas été prolongée ou rendue pérenne. De fait, elle n’était pas nécessaire : les voyageurs n’hésitent pas à s’emparer des panneaux pour communiquer, que ce mode d’expression soit dérisoire ou utile, fondé ou ridicule selon les points de vue.
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